Drawings / Engravings

Transe (1989), Série de monotypes de photo performance

Corrida (1991), Gravure

Borderline (1993), Série de 6 monotypes sur papier chiffon.

Saturne au féminin (1993), pierre noire sur papier

Mes premiers miroirs prescients sont apparus dans mon travail en 1991, lorsque je me risquais, sans en être lucide, à la transposition d’âme, pour exécuter dessins et poésies. Ainsi, lorsque des angoisses asphyxiantes me traversaient, je me réfugiais dans des oeuvres cathartiques. Ces terrifiantes angoisses ne sont apparues dans ma vie qu'à 5 moments, qui correspondent à 4 relations passionnelles, et une manipulation de viol. Elles sont en connexion directe avec mon sexe, mon coeur, et mon cerveau, alors, en parfait désaccords. Elles expriment en souterrain le moment du premier dégoût, mais surtout mon incapacité à le signifier normalement. Ce que je ne peux exprimer par des mots, je le fais d'abord avec le dessin, la poésie, et plus tard la danse, la performance. Le besoin de filtrer la violence de mes émotions par l'Art s'impose de lui même. Mais au lieu de les décrypter, je me satisfaisais de les vivre, et après les avoir vomies, je les exposais, et m'étonnais de voir le spectateur coi. Je crois que j'attendais qu'on me dise que cette violence était anormale, qu'on me prenne dans les bras et me console. Evidemment,cela ne se passait pas, et le silence qu'on me retournait, puis la suspicion, le jugement, me torturaient, et m'engageaient plus encore dans la voie de de la provocation. Pourtant, l'interrogation silencieuse qu'on me retournait se justifiait, car souvent, j’endossais le rôle de ma mère ou de mon père, de mes ennemis. Je leur donnais mes traits quand je ne les identifiais pas. Mes amants, en sadiques dévoilés se serviront notamment de ses performances, dessinées ou dansées pour justifier leurs cruautés et se placer en martyre. je leur facilitais la tâche dans l'inversion des rôles qui caractérisent leur pathologie. Cet élan masochiste m'a littéralement foutue ma vie amoureuse en l'air. Je n'ai cherché que des pères et des mères subsidiaires, pour les comprendre et leur pardonner, et j'ai échoué, ils n'ont fait qu'achever leurs sadiques desseins. Les miens illustraient une réalité que je réprimais, et qui m’était encore secrète à ces dates. Je les lisais comme des anticipations temporelles, et les interprétais comme signes prémonitoires funestes. 


J’ai eu alors cette obsession de me guérir d’un mal inconnu, avant de devenir mère. 





























Mes clients (1996), pastels gras sur papier. 50/65

Début 1996, je suis strip teaseuse professionnelle. Lorsque je termine ma journée, je rejoins mes anciens camarades des Beaux Arts, à Rennes. J'en avais invité certains à venir au peep show, deux ou trois y sont allés, les autres n'ont pas osé. Bruno Sex portait bien son surnom, il a été le premier à venir me voir jouer, même si lui ne l'a fait qu'à moitié ; je l'aimais bien, car il assumait son voyeurisme. Il faisait figure de Daron dans notre groupe d'éphèbes, de part sa corpulence, sa pilosité brune envahissante. Quelques temps plus tôt, lorsque j'étais encore à l'école, j'avais performé pour un de ses court métrages, que je n'ai malheureusement pas. Sur une toile blanche, encadrée je crois, je dansais nue et m'exhibais avec délice. Les professeurs avaient beaucoup apprécié ma performance et m'avaient conseillée par la suite de m'engager plutôt dans cette voie, que dans la mienne. C'est vrai que j'étais très obscure dans ma représentation de la sexualité, et mes exhibitions peintes étaient clairement anti sensuelles. Mais depuis que je m'effeuillais professionnellement, j'avais retrouvé la joie, le plaisir de la provocation érotique ludique et assumée, devant des spectateurs enchantés, même si certains je l'admets repartaient décontenancés de la cabine. Il faut dire que je ne les ménageais pas avec mes performances, autant artistiques que physiques, mais je ressentais de l'empathie extrême, à tel point que je martyrisais mon sexe pour feindre le plaisir. Moi, ce qui me faisait jouir, cérébralement, c'était de découvrir leurs travers, leurs marottes, leurs secrets intimes. Je pensais ainsi pouvoir comprendre le reste du Monde. Au pastel gras, je fixe 4 spécimens de mes clients. Je me souviens avoir réalisé cette série, sous une table, à même le sol, en quelques heures. Je réservais les autres clients qui m'ont marquée par leur singularité dans ma mémoire, pour un jour, les raconter, ou les peindre, si j'en ai le temps.  En 2021, je reprends ces dessins en peintures.

1996 Mes clients  pastels gras sur papier  50/65

2017 Série de 6 collages numériques

3h30, mon cerveau échappe à ce pourquoi il est programmé, il se connecte subitement à la réalité ; depuis l'opération, il refuse de se laisser prendre au jeu de la délectation perverse des rêves inconscients. Mon corps se scinde en deux au niveau du sexe, comme si mes jambes voulaient quitter mon coeur. Avant, lorsque cela m'arrivait, somnambule, je baisais, je m'empalais sur la queue de mon amant endormi, et frottais mon clitoris sur son ventre. Sa queue dans le mien, dure et immobile, son cerveau ailleurs, dans un ego trip qui maintenait l'engin toujours raide, j'étais possédée sans risque de possession. J'ai toujours préfèré les libertins, ou les apprenti-coquins, et plus encore, depuis que je ne suis plus amoureuse. Ceux là, pensais-je, à tort, n'iront jamais s'offusquer d'être objet de désir, plutôt que mari à retenir. Mais depuis que je suis ici, je n'en ai plus envie. Les amants de ce type, m'ont coûté trop d'énergie, je garde précieusement celle qui me reste pour mes enfants, et mon Art. J'essaie donc de les imaginer, et me frotte à mon matelas, impossible de jouir, sans me savoir humiliée, je renonce, ce type me dégoûte à jamais. Je sais que je ne dois pas avoir honte, ni culpabiliser, la merde dont m'ont rempli mes parents, puis ces amants, leurs erzatzs, est encore bien présente. Le seul moyen de la sortir est de vider encore et encore mon inconscient. Je dois cesser définitivement de m'en emplir, quitte à ne plus jamais baiser. Il faut que j'arrête de nourrir mon subconscient, que je pense à réévaluer ceux qui m'en redonneront l'aliment. J'ai ma petite idée, mais pas le temps. Je dois éviter ceux qui prônent la mort plus que la vie, je ne suis pas le sauveur, et encore moins la sorcière arachnide qui les arrangent bien pour se décharger de leurs horreurs, qu'ils les assument. Je me lève et dessine. Après deux années entières à bâtir le squelette idéal d'un livre autobiographique, je m'incline, il ne peut se faire en un seul tome. Le premier illustrera mon printemps, de l'enfance, aux "années Beaux Arts", juste avant le "pétage de plomb". Il sera l'annonce d'une épopée artistico féminine, l'amorce d'une bombe psycho sexuelle, l'introduction d'une histoire d'amour qui commence très mal.  Le dernier "acte magique" a fonctionné, les pièces du puzzle jaillissent de ma mémoire comme des champignons après les pleurs et les rires. Je crains maintenant de ne plus avoir suffisamment de temps pour tout raconter, mais surtout pour achever. J'ai des morceaux de tout partout, à relier, et beaucoup de vide à combler dans cet énorme puzzle. Beaucoup de mes travaux de cette époque ont disparu, volés, détruits, abîmés, ou volatilisés dans le grand réseau virtuel. Je les remplacerai, d'une manière ou d'une autre. il est important que le schéma soit complet, seule la cohérence révèlera la vérité, et donc la lumière sur mon obscur passé. Je veux dédier ma vie à la vie, puisque j'ai réussi à la reconquérir, c'est pourquoi je dois me concentrer sur ma délivrance. Je n'ai plus le temps non plus de m'essayer techniquement à la peinture à l'oeuf, ou à l'huile, à la gravure, il me faudrait reprendre la technique à zéro à zéro. Le dessin numérique, la photographie sommaire, les performances improvisées, les collaborations artistiques me semblent justes, ils répondent aux paramètres temporels et financiers d'une artiste pauvre,  d'une femme indécemment libre, d'une mère écartelée vive. A 5 mètres de mon lit encore humide de mes suées nocturnes, je m'attable, les ordinateurs ronronnent, et le stylet gratte fébrilement la table graphique. Les bruissements s'accordent aux sons sourds et souvent grinçants, hurlants, déments, de mes titres préférés. Je tripote mes machines, sabote mon cerveau. J'ai deux machines, l'une d'elle est connecté sur le Monde que je découvre, gràce notemment à l'affreux Facebook, dont je ne peux pas encore me passer, il me permet de connaitre ces gens qui se disent amis avec moi, il y en a encore beaucoup trop.  La séance dure, jusqu'à l'épuisement. Avant de m'effondrer, je sors avec mes chiens. Dehors, il n'y a pas âme qui vive, je suis le seul rectangle jaune et lumineux de cette sombre toile urbaine. Ete 2017 Insomnie

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